Ah, le lundi de Pentecôte… Férié ou pas ? Travaillé ou chômé ? Rémunéré ou offert à la patrie ?
Chaque année, ce jour-là sème la pagaille dans les plannings et fait froncer bien des sourcils côté RH. Spoiler alert : tout cela tourne autour de la fameuse journée de solidarité.
Instaurée pour soutenir les personnes âgées ou handicapées, elle suscite encore beaucoup de questions… et quelques grincements de dents. Allez, on remet les pendules à l’heure.
Qu’est-ce que la journée de solidarité? (Et pourquoi elle revient chaque année)
La journée de solidarité a été instaurée par la loi du 30 juin 2004, en réaction à la canicule de 2003 qui a durement touché les personnes âgées et handicapées. L’idée ? Créer un jour de travail supplémentaire pour les salariés, sans rémunération additionnelle, afin de financer les actions en faveur de l’autonomie.
Ce jour travaillé génère une contribution solidarité autonomie payée par les employeurs à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).
Elle s’applique aussi bien aux entreprises privées qu’à certains établissements du secteur public.
Comment fonctionne la journée de solidarité ? (Modalités, règles et subtilités)
Concrètement, la journée de solidarité consiste à travailler une journée de plus dans l’année — souvent un jour férié précédemment chômé, sans contrepartie salariale.
Important :
- Elle est limitée à 7 heures, même pour les salariés à temps plein.
- Elle n’est pas forcément fixée au lundi de Pentecôte. L’employeur peut la choisir avec l’accord du comité social et économique (CSE) ou par décision unilatérale en l’absence d’accord collectif.
Code du travail (Article L3133-7) :
« Les modalités d’accomplissement de la journée de solidarité sont déterminées par convention ou accord collectif d’entreprise ou, à défaut, de branche. »
Qui est concerné par la journée de solidarité ?
En théorie, tous les salariés du secteur privé sont concernés, quel que soit leur contrat (CDI, CDD, alternants…).
Mais il existe des exceptions :
- Les stagiaires ne sont pas concernés.
- Les mineurs de moins de 18 ans sont également exemptés lorsque la journée tombe un jour férié (article L3164-6 du Code du travail). Cette exemption s’applique aussi aux apprentis mineurs et alternants de moins de 18 ans.
- Les salariées en congé maternité sont également dispensées d’effectuer la journée de solidarité
- Les travailleurs à temps partiel effectuent un nombre d’heures au prorata de leur temps de travail.
- Les salariés en forfait jours doivent effectuer une journée de plus ou intégrer ce jour dans leur volume annuel.
En cas de changement d’employeur en cours d’année, une seule journée de solidarité est due par an (article L3133-10), peu importe le nombre d’employeurs successifs.
Quelle est la date de la journée de solidarité ? (Et peut-on la déplacer ?)
Le lundi de Pentecôte (en 2025, ce sera le 9 juin) est souvent choisi comme journée de solidarité… mais ce n’est pas une obligation.
D’autres options sont possibles :
- Un jour de RTT
- Un jour de repos
- Un autre jour férié habituellement chômé (à l’exclusion du 1er mai)
- Une journée définie par accord collectif ou usage d’entreprise
Il est même possible de fractionner la journée (ex. : 2 fois 3h30) si un accord collectif ou une décision de l’employeur le permet. Ce fractionnement doit respecter un cadre précis et être documenté.
Dans les départements de la Moselle, du Haut-Rhin et du Bas-Rhin, des spécificités s’appliquent en raison du droit local. Noël et le Vendredi Saint ne peuvent pas être choisis comme jour de solidarité dans ces régions, afin de préserver la spécificité du droit local qui accorde aux salariés d’Alsace-Moselle deux jours fériés supplémentaires par rapport au reste de la France.
Comment est rémunérée la journée de solidarité ? (Spoiler : souvent, elle ne l’est pas)
Dans la plupart des cas, la journée de solidarité est non rémunérée, sans majoration :
- Elle ne donne pas lieu à un salaire supplémentaire pour les salariés mensualisés.
- Elle n’entraîne pas de réduction de congés.
- Aucune ligne spécifique n’est obligatoirement indiquée sur la fiche de paie, mais certaines entreprises le mentionnent à titre informatif.
Bien que la mention de la journée de solidarité ne fasse pas partie des mentions obligatoires du bulletin de paie, il est fortement recommandé d’y indiquer la date effectuée par le salarié. Cette mention permet d’apporter la preuve que la journée a bien été réalisée, particulièrement important en cas de fractionnement des heure.
Exceptions à connaître :
- Si le salarié dépasse le temps de travail légal (35 heures), la journée peut devenir du temps supplémentaire rémunéré.
- En cas d’absence ce jour-là (arrêt maladie, congés, etc.), aucune retenue ne peut être appliquée.
Les heures effectuées au titre de la journée de solidarité ne sont pas considérées comme des heures supplémentaires, sauf disposition plus favorable prévue par l’accord collectif.
Les obligations des employeurs (et les erreurs à éviter)
L’employeur doit clairement informer les salariés des modalités retenues. Il peut :
- Fixer le jour dans un accord collectif,
- Ou le déterminer unilatéralement, en consultant le CSE si nécessaire.
Il doit :
- Respecter le droit du travail
- Garantir un temps de repos équivalent si la journée tombe sur un jour de repos
- Prévoir des modalités claires pour les salariés absents
En cas de non-respect des règles, l’entreprise s’expose à des litiges prud’homaux et à des sanctions financières.
Exceptions, cas particuliers et situations complexes
Arrêt maladie ou congés payés :
- Le salarié est exempté de la journée s’il est en congé ou en arrêt le jour prévu.
Changement d’entreprise :
- Un salarié qui change d’employeur n’effectue qu’une seule journée de solidarité sur l’année, même si son nouveau contrat ne le précise pas.
Temps partiel et forfait jours :
- L’obligation est calculée au prorata du temps de travail.
- Dans le cas du forfait jours, la journée peut être incluse dans les jours travaillés annuellement.
Refus du salarié :
- En l’absence de raison légitime (congés, arrêt, etc.), un refus d’effectuer la journée peut être sanctionné. Toutefois, il doit être encadré avec prudence.
Chômage partiel / activité partielle :
- La journée ne s’applique pas si le salarié ne travaille pas en raison d’une mesure exceptionnelle.